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Mission à Montgenèvre : Le droit d’asile bafoué

François Alfonsi accompagné de Salima Yenbou et Alfred Spira à Montgenèvre le 5 mars 2021.

 

Depuis plusieurs années, imperturbablement malgré la difficulté de la tâche, les associations humanitaires tiennent des maraudes à la frontière italienne, là où les migrants trouvent le chemin pour passer en France, et gagner ensuite l’Angleterre ou l’Allemagne de préférence. Ils sont souvent interpellés à la frontière, en opposition aux lois françaises et autres Conventions internationales sur le droit d’asile. Nous sommes dans les Alpes, à haute altitude, il y fait très froid. Parfois on retrouve sur cette route, des personnes mortes de froid, comme ce jeune togolais il y a deux ans. Il est donc inhumain et meurtrier de les refouler car on sait qu’ils n’ont pas fait autant de kilomètres pour rebrousser chemin si près du but. Associations humanitaires comme Médecins du Monde ou Tous Migrants effectuent des maraudes pour leur porter secours, les conseiller, s’opposer aux douaniers et gendarmes qui abusent de leurs autorités et bafouent le droit d’asile. Depuis plusieurs mois, les eurodéputés Verts/ALE se relaient également pour apporter leurs soutiens aux migrants et aux associations. Dans les nuits du jeudi 4 et du vendredi 5 mars dernier, François Alfonsi était présent à la frontière entre Briançon et Montgenèvre pour veiller à l’application de leurs droits. Il nous livre ses impressions. 

Le point de passage routier leur étant interdit, les migrants empruntent des chemins enneigés et plongés dans l’obscurité.  Leur périple à pied, avec bagages et enfants, parfois même des personnes âgées, prend plus de deux heures dans le froid, la neige, l’obscurité, avec le risque de se perdre. Ils sont guettés aux différents points d’arrivée par les policiers et les gendarmes, dont ils se cachent en restant immobiles dans le froid. Quand ils les appréhendent, les policiers les amènent au poste frontière de la PAF, puis les refoulent en Italie en appelant les carabinieri qui viennent les récupérer et les ramènent à Oulx. D’où ils repartiront systématiquement les jours suivants. 

En arrivant à Montgenèvre, nous avons été réceptionnés par deux véhicules de l’organisation Médecins du Monde. Une certaine tension régnait avec les gendarmes qui avaient verbalisé trois d’entre eux au prétexte que leur attestation de couvre-feu avait coché la case n° 1 au lieu de la case n° 3. En les pénalisant financièrement et regulièrement, la gendarmerie se rend coupable d’un véritable harcèlement. J’ai protesté énergiquement auprès de la Préfète des Hautes Alpes qui nous a été présentée comme leur responsable décisionnelle. Elle m’a répondu qu’elle ne faisait que veiller au respect du couvre-feu et a invité à faire un recours auprès du Procureur de la République près le Tribunal judiciaire de Gap. Cette réponse kafkaienne, procédurale et surréaliste, est un révélateur du mépris des autorités pour ces militants humanitaires et de la volonté de harcèlement à leur encontre.

Tout cela est profondément dérisoire et ridicule. J’ai le sentiment d’avoir fait un voyage en Absurdie, sorte de royaume bête et méchant d’un Roi Ubu des temps modernes.

Le nombre, l’abnégation et la résilience admirables des dizaines de bénévoles qui chaque nuit depuis des années, malgré le froid, malgré le harcèlement des forces de l’ordre, malgré les épreuves physiques et morales, maintiennent une présence humanitaire qui sauve l’honneur du pays. Briançon a la fierté de pouvoir déclarer que pas un de ces migrants ne dort dans la rue, et la mobilisation collective, chiffrée à 2000 contributeurs sur 12.000 habitants, donne une âme nouvelle à cette ville frappée par une crise économique profonde (fermeture des garnisons, endettement colossal). Je suis scandalisé que les pouvoirs publics n’adressent que mépris et hostilité à ces populations généreuses.

Pour conclure je leur dédie ces paroles de l’hymne d’un peuple montagnard voisin, les Allobroges de Savoie :

« Allobroges vaillants, dans vos vertes campagnes,

Accordez-moi toujours, asile et sûreté.

Car j’aime à respirer, l’air pur de vos montagnes,

Je suis la Liberté, LA LIBERTE ! »

François Alfonsi 

 

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