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L’an III de la guerre en Ukraine

Depuis le 22 février dernier, nous sommes entrés dans l’an III de la guerre en Ukraine. Entre mars et novembre 2022, l’invasion militaire lancée par Vladimir Poutine, persuadé de sa supériorité, s’est heurtée à une résistance qui l’a fait rapidement reculer de plusieurs centaines de kilomètres, loin de Kyiv, de Kharkiv et même de Kherson. Le bilan était alors mitigé : des milliers d’hectares supplémentaires du territoire ukrainien sont occupés qui ont étendu tout autour de la mer d’Azov l’emprise russe déjà installée en 2014 en Crimée et dans une partie du Donbass. Mais la contre-attaque de l’armée ukrainienne, rapidement menée, grâce en particulier au soutien international orchestré en grande partie par les USA, a su renverser le cours de la guerre et donner aux forces ukrainiennes une dynamique positive. Fin de l’Acte I.

A partir de mars 2023, côté ukrainien, l’heure a été à la contre-offensive, et, côté russe, à la reprise de nouvelles positions contre les troupes ukrainiennes. Ni l’un ni l’autre n’ont atteint leurs objectifs. Les « percées » ukrainiennes se sont brisées sur la capacité militaire russe qui a su construire des défenses hermétiques, tandis que les troupes « kamikaze » mobilisées notamment par la milice Wagner n’ont repris qu’un nombre très limité de positions ukrainiennes dans le Donbass comme à Bakhmout. D’autres « victoires » sont proclamées (comme Avdïivka fin 2023) mais rien de décisif n’est intervenu., Cependant, le message est suffisamment fort pour indiquer qu’un retournement de tendance est à la portée de l’armée russe. Fin de l’Acte II.

A l’aube de l’an III qui verra un nouveau déclenchement d’hostilités jusqu’à novembre prochain, l’incertitude règne dans les deux camps.

L’Ukraine a remporté d’incontestables succès en Mer Noire. Le « corridor d’exportation » vers le détroit du Bosphore est sécurisé et permet de donner à l’économie des ressources vitales. Plusieurs navires de guerre russes ont été détruits par les drones, aériens comme sous-marins, et les missiles dont l’Ukraine s’est dotée. Le débarquement annoncé vers Odessa semble déjoué désormais, garantissant une façade maritime au sud du pays.

La principale supériorité militaire russe tient à sa logistique en munitions d’artillerie, car elle en produit plus de quantité, et plus vite, que l’Ukraine et ses alliés. Impossible dans ces conditions de reprendre une offensive terrestre qui serait vouée à l’échec, surtout depuis que le fournisseur principal, les USA, qui ont désormais donné leur priorité au Moyen Orient en soutien d’Israël, et qui voient la volonté de continuer un soutien élevé affichée par Joe Biden contestée au Congrès, gelant depuis de longs mois le réapprovisionnement de l’Ukraine en matériel de guerre. Ce retrait américain est d’autant plus inquiétant qu’il est piloté en sous-main par Donald Trump dont on ne peut exclure qu’il redevienne président des Etats-Unis en novembre prochain.

La seule solution pour les Ukrainiens est alors d’obtenir la montée en puissance de l’Europe en soutien à leur effort de guerre dont le succès serait la meilleure garantie pour la sécurité du continent, notamment à l’Est. Les accords bilatéraux avec l’Allemagne, la France, la Tchéquie, les pays baltes, se multiplient.

Au sein de l’Union Européenne le débat s’anime, et Emmanuel Macron a décidé d’y prendre sa place en durcissant considérablement le ton avec Moscou. Le Parlement Européen a pour sa part massivement soutenu la mise en place d’un mécanisme de soutien économique, et aussi pour l’approvisionnement en armes et munitions de l’armée ukrainienne. Mais les moyens manquent, moyens financiers et moyens industriels, alors que la Russie affiche de fortes performances dans ces domaines. Une course contre la montre s’est engagée et il faudra beaucoup d’efforts pour l’emporter.

Car, contrairement aux effets d’annonce au commencement du conflit, l’économie russe a très bien résisté aux sanctions économiques occidentales. Certes le gaz et les produits pétroliers qui étaient auparavant livrés en Europe et payés en euros sont désormais livrés à la Chine et à l’Inde où ils sont payés en yens et en roupies. Dans le cas de l’Inde, les échanges sont tellement déséquilibrés que le Trésor Russe croule sous une montagne de roupies inutiles ! Mais c’est un inconvénient mineur. La sortie du système SWIFT qui encadre le commerce mondial devait être une arme économique « nucléaire ». Elle a fait pschitt ! Et tout à l’avenant ou presque de ces sanctions restées de peu d’effet.

Le principal danger aujourd’hui serait de mollir dans le soutien à l’Ukraine. Il faut au contraire réussir à pallier la défaillance américaine. Poutine vient de se faire réélire et il se sent légitimé pour continuer son projet impérialiste d’annexion. L’élimination de ses opposants, dont l’assassinat d’Alexei Navalny a été le symbole conçu pour intimider toute forme d’opposition, lui laisse les mains libres. La seule résistance est en Ukraine et elle appelle un soutien total jusqu’à ce que le sort des armes ait très clairement tourné à l’avantage des Ukrainiens. C’est alors que l’on pourra parler de négociations.

François ALFONSI

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