Les commandos palestiniens du Hamas ont déclenché par leur action terroriste en territoire israélien un risque d’embrasement du conflit dont les conséquences sont potentiellement très lourdes. A l’heure de la vengeance décidée par Israël, tout devient possible.
Un besoin de vengeance s’est installé en Israël. Il est consécutif au choc provoqué par les massacres perpétrés le 7 octobre dernier par les commandos armés sortis de Gaza qui ont répandu la terreur et la mort en territoire israélien.
S’il est animé par le ressentiment contre ces tueries aveugles, il l’est aussi par le besoin de restaurer l’image d’une infaillibilité sécuritaire que le déroulement des faits a gravement ébranlée. La totale défaillance des services de renseignements, l’absence de réaction de l’armée qui a laissé le temps aux assaillants d’agir puis de revenir en grand nombre à Gaza en y ramenant des centaines d’otages, les limites rencontrées par la défense anti-missiles d’un « dôme de fer » débordé par les salves de roquettes tirées par le Hamas, tout cela a sonné le glas de la certitude jusque-là partagée par les Israéliens et leurs alliés quant à une supériorité militaire apte à garantir à vie la sécurité des citoyens vivant en Israël.
Abrité derrière cette protection réputée invulnérable, le gouvernement Netanyahu a poussé toujours plus loin son projet d’un Israël hégémonique, sabotant tout espoir d’un Etat palestinien avec lequel cohabiter demain. Tout en consolidant ses alliances en convainquant chacun de son invincibilité, y compris plusieurs pays arabes qui ont conclu des accords stratégiques à rebours de leurs opinions publiques, il a amplifié sans relâche les implantations de colonies nouvelles en Cisjordanie, jusqu’à y rendre illusoire la possibilité d’un territoire apte à recevoir une administration palestinienne crédible en tant qu’État reconnu par la Communauté Internationale.
Cette dernière s’est complaisamment accommodée de cette situation qui réduisait l’Autorité Palestinienne à un pouvoir fantoche, qui entretenait le sentiment d’humiliation des Palestiniens et de tous leurs soutiens à travers le monde, et qui réduisait à néant les résolutions votées par l’ONU pour une solution à deux États.
Les représailles armées annoncées par Israël après les massacres commis par le Hamas sont redoutées, dans le contexte d’un blocus total de l’enclave, laissée sans ravitaillement, sans électricité, sans eau, et exposée à un déluge de feu. Le désastre humanitaire annoncé risque de dépasser toutes les limites du tolérable pour l’opinion mondiale, et particulièrement parmi les opinions publiques du monde musulman.
Cela donnera motif à de nouveaux fronts pour s’ouvrir, aux frontières d’Israël avec le Hezbollah ou avec plusieurs acteurs présents en Syrie, avec le soutien de l’Iran qui a déjà déclaré ses intentions. Sans compter la montée d’une révolte probable parmi les Palestiniens de Cisjordanie et aussi parmi les populations arabes d’Israël.
Pour prévenir d’éventuelles attaques iraniennes qui pourraient déborder la défense de Tsahal, les USA ont dépêché deux porte-avions en Méditerranée, de quoi dissuader une agression d’envergure contre Israël. Mais chacun mesure bien l’instabilité qui pourrait découler d’une intervention à Gaza aux conséquences dramatiques.
Or l’objectif affiché – éradiquer le Hamas – suppose une occupation longue du territoire, et la quasi-destruction de son habitat. L’hypothèse d’envoyer les gazaouis dans des camps de réfugiés en Égypte par la frontière sud reviendrait à une épuration ethnique d’une population vingt fois plus importante que celle des Arméniens du Nagorno-Karabakh. Et l’Égypte se refuse à les accueillir.
Dans le contexte du Proche Orient, le conflit palestinien est depuis longtemps un conflit-clef pour la Paix dans le Monde. Dans les semaines qui viennent, le risque est grand d’une situation qui dérape gravement.
François ALFONSI
